Une étonnante et belle découverte !
La ville de Rennes vient de terminer la rénovation du couvent des jacobins. Une exposition exceptionnelle inaugure la mise en service de ce magnifique espace qui devient centre de congrès.
Excusez du peu c’est la collection Pinault qui est installée du 23 juin au 9 septembre 2018. François Pinault répondait avec enthousiasme à l’invitation de Nathalie Appéré, maire de Rennes, exprimant ainsi son attachement aux paysages bretons, aux contes et légendes et à l’histoire de notre Bretagne.
Caroline Bourgeois, conservatrice de la collection Pinault et commissaire de l’exposition, a sélectionné une vingtaine d’artistes, sur un propos volontariste : » Debout ! »
Cri qui claque comme un une sommation, un mot d’ordre, une manière d’y croire encore, de tenir sur ses pieds, de ne pas mettre genou à terre, de toujours se relever, de continuer à avancer.
L’exposition propose des œuvres évoquant notre histoire récente et leurs conséquences, l’énergie mobilisée pour nous relever de ces périodes néfastes. Puis nous prenons du recul sur la façon dont cette histoire se répète et enfin nous découvrons de façon plus temporelle des œuvres qui évoquent la question de notre destin et de la mort.
Je vous invite donc à découvrir ici quelques photos que l’on m’a autorisé à prendre ainsi que les commentaires qui les accompagnent.
Le grand hall de l’exposition nous donne d’entrée la dimension de ce qui nous attend : œuvres monumentales et coup de fouet à l’imagination.
Le nouvel espace d’exposition propose une réflexion sur les crises du 20ème siècle.
Deux frères britanniques, organisent dans neuf vitrines, les figurines de 30 000 petits squelettes de soldats nazis, pour nous démontrer l’absurdité de la seconde guerre mondiale. Impressionnant !
PS : De grosses difficultés pour le photographe de traiter les reflets des vitrines.
Le visiteur passe de scènes apocalyptiques à la vue d’un enfant endormi dans sa poussette. Il est stupéfait de cette réalisation hyperréaliste, en résine.
Un Christ en croix, sans tête ni bras. L’artiste ne nous donne qu’un fragment d’objet suggérant les effets déplorables de la colonisation.
Him, lui ; quel est cet enfant agenouillé face au mur, propret, bien coiffé, que l’on aperçoit de dos ? Le spectateur ne peut s’empêcher de faire le détour pour découvrir le visage de ce garçonnet « bien élevé ». La réponse est violente, c’est bien lui, ses traits, sa moustache.
Le dictateur, avant d’avoir été le monstre que l’on connaît, fut d’abord un enfant !
Le réfectoire nous offre une très belle rénovation ainsi que la qualité et la dimension des œuvres présentées :
Le cloître nous révèle une sculpture, longtemps installée à la pointe de la douane à Venise :
Le garçon tient fermement dans son poing la patte d’une grenouille. La sculpture n’est pas en marbre, mais en acier inoxydable. Il se dégage de la posture, un sentiment de domination. On ne s‘interroge le devenir de l’animal.
La salle suivante dérange.
Cinq peintures de Vincent Gicquel nous apostrophent. Elles font penser à Edward Munch et entretiennent une relation étrange entre tragédie et comédie, explorant que l’homme en dépit de tout, tient debout, tient tout court et avance.
Le premier tableau (Aplomb) suggère un échange entre celui qui regarde et celui qui est observé. Les couleurs rappellent une célébration de la vie et une conscience de la mort.
Le second (Debout) présente un personnage unique mis en valeur par un contour affirmé. C’est en choisissant de rester debout que l’homme démontre sa nature profonde et sa fulgurante envie de vivre.
Le troisième (Cortège) accroche notre œil par le regard insistant des personnages. Leurs corps passés par les épreuves semblent accepter les obstacles et le temps qui passe.
Le quatrième (Ablution) présente deux silhouettes qui s’opposent par leur posture et leurs couleurs. Elles semblent surprises de notre observation et témoignent de leur capacité à surmonter l’existence et à l’affronter.
Le cinquième (Pédoncule) oppose la représentation végétale de droite et la silhouette dépouillée de toute vanité, dans la simplicité de l’existence.
A noter que ces tableaux datent de 2017 et 2018.
Le déambulatoire nous conduit à la réflexion métaphysique
Deux entités en aluminium revoient des reflets déformés et mouvants de nous-mêmes. Elles semblent exprimer la difficulté de communiquer.
Les étonnants squelettes plus grands que nature, aux visages menaçants, nous déroutent par le contraste entre leurs expressions et leur frêles structures recouvertes de couvertures. Leurs corps d’acier enchaînés et leur tête en silicone, peuvent nous faire penser à des prisonniers de notre société, s’efforçant à rester debout.
Cette sculpture, élément d’un groupe de quatre rappelle les caricatures de Daumier, avec ses trois compères, elle suscite un sentiment d’inquiétude voire d’intimidation.
Pour conclure
Nous avons, mon épouse et moi, été ravis de notre visite dans les espaces de cette exposition. Les locaux rénovés du couvent de jacobins, respirent l’espace et la sérénité. La qualité de œuvres exposées, leur taille parfois imposante, l’étonnante créativité des artistes de la collection Pinault, nous ont fait passer un merveilleux moment. J’invite le lecteur à s’y rendre en souhaitant qu’il y trouve le même intérêt ; elle ferme ses portes le 9 septembre 2018.
Pour mieux apprécier: Un clic et laissez-vous conduire…